Mehdi Ghaghda, clefs d'Or de père en fils
Mai. 2017 \\ Par Jérôme Lamy

A 29 ans, Mehdi Ghaghda peut revendiquer le titre de plus jeune concierge Clefs d’Or au?Maroc. Et si son père a occupé la loge du Palace Es-Saadi, à Marrakech, c’est dans celle du Savoy Le Grand Hôtel qu’il fait le bonheur de ses clients.

Mehdi Ghaghda connaît son histoire: celle de sa famille et celle de sa profession. Ça tombe bien: les deux sont liées. C’est en marchant sur les traces de son papa, Errouk, que Mehdi est devenu un chef concierge reconnu et respecté.

Pour pousser la filiation encore plus loin dans le mimétisme, Mehdi porte sur les deux revers de son uniforme des clefs dorées croisées. C’est ainsi qu’on distingue un concierge d'hôtel Clefs d'Or. Comme son papa, Mehdi appartient à ce club fermé, créé en 1929, à Paris, par Pierre Quentin, concierge à l’Hôtel Ambassador.

A 29 ans, Mehdi Ghaghda peut même revendiquer le titre de plus jeune concierge Clefs d’Or au?Maroc. Et si son père a occupé quarante années durant  la loge du Palace Es-Saadi, dans le quartier de l’Hivernage, à Marrakech, c’est dans celle du Savoy Le Grand Hôtel que Mehdi accueille ses clients.  «La distinction Clefs d’Or m’offre une crédibilité dont je suis fier» confie Mehdi. «Quand un client s’approche de moi, je ne sais jamais s’il va me demander l’heure ou la lune.»

Il essaye toujours de la décrocher, souvent avec succès. En tout cas, son sourire, son empathie, sa bienveillance et sa sincérité font toujours l’unanimité.

Parce qu’il admirait son père, Mehdi défend ce métier à la noblesse parfois écornée. «A la cour de France, chaque employé avait une tâche déterminée» précise Mehdi. «Avant l’invention de l’électricité, un homme était préposé à l’allumage des cierges. Cet homme avait la confiance absolue du roi, car, en plus d’éclairer tous les locaux du château, il devait l’accompagner jusqu’à sa chambre à coucher. Le monarque avait tellement confiance en lui qu’il lui avait octroyé le titre de ‘Comte des cierges’. Ainsi naquît l’appellation de ‘concierge ‘.»

Dans l’hôtellerie, le concierge a sa loge. Mehdi n’est pas seul à la tâche. Au Savoy le Grand Hôtel, il est entouré d’une équipe de grande qualité. Portiers, bagagistes, chauffeurs lui prêtent main forte. «Trop de gens s’improvisent concierges et nuisent  à notre profession» regrette Mehdi. «Du coup, nous sommes parfois caricaturés comme des affamés de commissions, ce qui est très péjoratif et très loin de la vérité. Ma seule et première ambition est la satisfaction des clients.»

Mehdi a d’ailleurs déniché une pépite: il n’hésite jamais à recommander le Buddha Bar, une référence gastronomique et festive internationale qui remporte tous les suffrages.

Si Mehdi Ghaghda est diplômé de Vatel Marrakech, la grande école Internationale d'hôtellerie et de management, c’est à la maison, auprès de son père, qu’il a reçu la meilleure formation. «Quand mon père rentrait à la maison avec son costume chic, je le regardais avec admiration» confie Mehdi. «Son professionnalisme rejaillissait sur la vie de notre famille. Il était toujours à l’heure, toujours très ordonné. Il faisait preuve d’un sens du détail de chaque instant. Il m’a donné envie de faire son métier et d’aller le voir au travail, dans sa loge, au Palace Es-Saadi. Même si j’étais jeune, je comprenais que mon père prenait beaucoup de plaisir au travail. Avec ses cours du soir, il m’a appris son métier et la vie.»

Le petit Mehdi était fier du papa qui a eu l’honneur de servir des têtes couronnées, des acteurs, des sportifs et autres célébrités comme Ingrid Betancourt, Yves Saint-Laurent, Jacques Chirac, Catherine Deneuve. Encore aujourd’hui, il n’hésite pas à demander des conseils à son modèle. «Quand je suis dans un tunnel, c’est souvent lui qui me permet de trouver la lumière» confirme Mehdi.

Il peut aussi compter sur son expérience riche et diversifiée. Après Vatel, il effectue un stage de pré-embauche comme concierge et guest-relation, à Courchevel, au Palace La Sivolière. «J’ai découvert l’élégance française et la gestion d’une clientèle de princes, de rois, de milliardaires» dit Mehdi qui ne tardera pas à céder au mal du pays et revenir au?Maroc pour l’ouverture du Delano. Embauché comme chef concierge, il aime collaborer sous la direction d’Aziz Bendriss.

N’empêche, il prend la direction de Doha pour enfiler le costume de chef concierge au Sheraton où il découvre le monde du business. C’est là qu’il rencontre Kamel Abou Aly, alors en plein travaux pour l’ouverture du Savoy Le Grand Hôtel et du Menara Mall. Le courant passe si bien entre les deux hommes aux valeurs humaines évidentes que Mehdi Ghaghda devient rapidement un homme de confiance du grand industriel égyptien.

Il rentre au Royaume pour s’installer naturellement dans la loge du Savoy. «Kamel Abou Aly est un personnage extraordinaire qui nous pousse à donner le meilleur de nous» confie Mehdi. «Il sait être très exigeant mais il a aussi la capacité d’offrir une confiance énorme. Surtout, c’est un homme du métier. Il ambitionne la meilleure qualité de service. Il est très crédible. On le chouchoute mais il est très simple dans sa façon de vivre.»

Pas étonnant que la place préférée de Kamel Abou Aly, au Savoy, soit dans le petit salon, à gauche du lobby... en face de la conciergerie.