Le Palace: La caverne d’Alil Vardar
A 40 ans, Alil Vardar triomphe au Palace dans Le clan des divorcées, dont il est l’auteur, l’interprète et le producteur. C’est en rachetant le Palace, le club mythique des nuits parisiennes et en le transformant en une salle de spectacle, qu’il est entré dans la lumière.
Bien qu’il paraisse décontracté, l’homme est pressé : il regarde sans cesse sa montre, interrompu par des comédiens de passage, des coups de fil incessants ou par le patron du Brébant où il a ses habitudes. Il répond à tous avec amabilité et courtoisie.
A 40 ans, Alil Vardar est devenu à la fois auteur, interprète, producteur et directeur de théâtre. C’est en rachetant le Palace, le club mythique des nuits parisiennes et en le transformant en une salle de spectacle, qu’il est entré dans la lumière. C’est pour cela qu’il a pris dans la figure une vraie vague de jalousie? La rançon du succès sans doute... En tout cas, rien ne le prédestinait à un si brillant avenir.
Ce solide belge, d’origine albanaise, pourtant bon élève, a quitté l’école à 15 ans. Ce qu’il veut c’est réussir, prendre sa revanche et surtout dit-il “ne pas perdre de temps.” Fils d’épicier, il travaille quelques mois dans l’affaire familiale, mais bien vite il développe son sens des affaires et décide, aidé par ses frères, d’investir dans l’immobilier. L’idée est simple : acheter des appartements en piteux état et les restaurer. Les économies et les efforts investis s’avèrent rentables.
L’envie, le besoin de faire rire est venu à 22 ans : ses amis, sa famille le soutiennent et viennent l’applaudir pour la première fois au Black Bottom, un bar de Bruxelles. Avant-gardiste, il s’essaie au stand-up avec ses propres sketchs. Puis, en 93, il crée le duo des « Fous Alliés » avec son ami d’enfance Jamin Chtouki.
Il vend ses appartements et achète son premier théâtre à Bruxelles : Le Comiqu’Art, suivront sous la même enseigne ceux de Liège, Charleroi et Montpellier. “Ce dernier, est le seul échec de ma carrière” concède t-il. Il s’installe à Toulouse et joue à guichet fermé au Théâtre des 3T, il en fera également son lieu.
L’aventure des Fous Alliés durera 9 ans et lui permettra d’en vivre, bien, mais pas assez selon lui. De 100 spectateurs, il veut passer à 1000. Pour cela il lui faut un tube, son succès. Il fouille ses tiroirs et parmi la dizaine de spectacles qu’il a écrits, il en sort un: Le Clan Des Divorcées.
Les premières ont lieu à Toulouse, la salle ne désemplit pas pendant plus de 6 mois. Grâce aux bénéfices, il achète le théâtre Le Paris à Avignon, le succès est également au rendez vous là bas. Il reçoit alors une proposition du Théâtre du Temple à Paris pour quelques représentations.
En 2004, pour la première fois, il est à l’affiche d’une salle parisienne, mais il ne se sent pas chez lui : trop de contraintes. Alors, comme à son habitude, il va trouver un lieu et le faire devenir sien. Ce sera La Comédie République. Il pensait alors qu’un belge à l’affiche d’une comédie populaire aurait quelques difficultés à se faire une place dans la capitale, il n’en est absolument rien. Loin s’en faut !
Grâce à l’excellent bouche à oreille, et à la qualité de l’interprétation, la salle est quasi pleine tous les soirs. Alil ne s’arrête pas en si bon chemin et ouvre à Noel 2005 La Grande Comédie, rue de Clichy, une salle de 400 fauteuils. La demande est grandissante, les séances hebdomadaires s’additionnent. Néanmoins, il manque quelque chose pour que la réussite soit totale : la reconnaissance de ses pairs et de la presse.
Etonnamment, Alil ne savait pas que le Palace lui ouvrirait ces portes tant convoitées, car à l’origine, lorsqu‘avec ses frères, il visite le lieu laissé à l’abandon, il ignore tout de l’histoire de ce temple de la nuit parisienne des années 80. Il avoue : “on ne savait pas ce que c’était sinon on ne l’aurait jamais repris”.
Le lieu est classé monument historique, tout doit être reconstruit aux normes, se succèderont des imbroglios juridiques, la gestion des problèmes de voisinage , de bruits, de sécurité, mais au-delà de ces soucis techniques, Alil Vardar avoue que pour lui les difficultés se sont placées étrangement ailleurs, où il ne les attendait pas...?“Une fois la salle ouverte, ce sont les autres théâtres qui ont essayé de fermer le Palace, ouvrir et faire fonctionner un tel lieu montrait la médiocrité d’exploitation de plein d’autres théâtres.”
La très médiatisée Valérie Lemercier fait l’ouverture en Novembre 2008, avant une série de concert de Jane Birkin. Puis le plus naturellement du monde, Alil Vardar vient fouler les planches de sa salle flambant neuve, en Février 2009, toujours avec son tube, « Le Clan des divorcées ».
Il continuera jusqu’à la fin de l’été, et, à partir du 29 septembre, Florence Foresti sera à son tour à l’affiche avec son tout nouveau spectacle « Mother Fucker ». Occasionnellement, Le Palace est exploité en journée pour des défilés, des enregistrements d’émissions TV, et, c’est lors d’une émission consacrée au rire présentée par Laurent Ruquier qu’ Alil croise Eve Angéli. Le courant passe entre l’homme d’affaire et la belle ingénue : ils veulent travailler ensemble.
C’est désormais chose faite, puisque Eve incarne brillamment à ses côtés le rôle de Mary Bybowl dans la pièce qu’il n’est plus besoin de citer car, avec un direct sur France 4 mi-mai, 800.000 spectateurs et près de 80.000 DVD vendus sans distributeur, son succès n’est plus contestable, d’ailleurs l’adaptation au cinéma est en préparation…
Ce qui a changé depuis qu’il possède le Palace ? “La vision des autres, pour eux, de corsaires, nous sommes devenus barons, à la mode, fréquentables.” Quand Alil dit nous, il parle aussi de ses frères, Hazis et Hamdi qui le soutiennent dans tous ses projets. Ensemble, ils sont la base de la pyramide, une base solide et stable qui gère les 58 employés des salles parisiennes.
Le propriétaire du Palace a les yeux rivés sur l’heure et s’excuse de devoir partir. Comme chaque soir, il va revêtir son costume de scène pour retrouver le public à qui il assène un généreux “Soyez Heureux” avant que le rideau ne se referme.