Demis Roussos: le retour
Octobre. 2009 \\ Par Jérôme Lamy

Avec l’album intitulé « Demis », concentré de Rock et de Soul sorti en mai dernier, Demis Roussos effectue un magnifique retour au premier plan. La star grecque sera en concert au Grand Rex le 2 février 2010.

Nous l’attendons sur le toit du Rex par une matinée ensoleillée. On ne peut s’empêcher de l’imaginer, djellaba au vent, psalmodiant de sa voix inimitable un de ses tubes qui ont fait sa renommée. Demis Roussos n’est pas seulement un chanteur de variétés. Adolescent, l’enfant d’Aphrodite est bercé par les sons rock de Bill Haley. Musicien accompli, il débute dans des groupes de jazz en Grèce. Trompettiste, bassiste, il s’essaie au chant et entonne des titres de l’époque tels que « When a man Loves a woman », ou « The house of the rising sun » devant un public conquis.

Ses rencontres avec Vangelis, plus grand compositeur grec de musique de films («Les chariots de feux», « Blade Runner » , «1492 : Christophe Colomb »), et Boris Bergman, parolier de célèbres interprètes (de Dalida à Bashung), sont déterminantes.
Le premier 45 tours des Aphrodite Childs est enregistré en 1968, en pleine confusion générale. « Rain and Tears », ce succès aux essences pop se vend à des centaines de milliers d’exemplaires, suivra « It’s five O’ Clock” et l’album « 666 » que Liam Gallagher du groupe Oasis considère comme l’un de ses disques de référence.
La collaboration avec Bergman et Vangélis dure deux ans puis Demis se tourne vers une carrière solo tout aussi prometteuse. Nous, français, ne sommes pas les seuls à revendiquer Demis comme un chanteur de notre pays, sa renommée est également colossale à travers l’Europe, mais aussi en Russie et en Amérique du Sud, où il a rempli un stade de 150.000 fans, record inégalé, Franck Sinatra mis à part.
50 millions de disques vendus en 40 ans de carrière, des disques d’or à ne plus savoir qu’en faire, Demis ne s’arrête pourtant pas en si bon chemin…
Il rencontre Marc Di Domenico, artisan des albums de Micky Green, des BB Brunes et d’Henri Salvador avec « Chambre avec Vue ». Demis veut retourner à ses premiers amours : le Rock. L’association des groupes anglais Little Barrie et Dirty Feel, combinée au talent d’auteur compositeur du français Picci lui donne cette opportunité.
L’album intitulé « Demis », concentré de Rock and Soul est sorti le 11 mai 2009, le premier concert français aura lieu au Grand Rex le 2 février 2010.
La porte du lieu s’ouvre, un Demis charismatique fait son entrée en compagnie de Bruno Blanckaert, sobrement vêtu de noir, canne en main. Sa ravissante fille Emily, qui est également son manager l’accompagne.
Après la séance photo, nous nous installons en toute simplicité dans sa future loge et parlons du passé, de son album, de ses projets. Il répond à tout avec ce sourire qui le caractérise, parfois, il laisse échapper un éclat de rire qui réchauffe l’âme et le cœur, tout autant que son nouvel album…

Clin d’oeil.- Vous êtes avant tout musicien, qui vous a donné envie de jouer ?
Demis Roussos.- Je suis né à Alexandrie, j’ai grandi dans une communauté grecque importante, multiculturelle. Dans la rue les sons arabes m’ont inspiré, étant petit j’écoutais Bill Haley sur la radio étrangère. Mes parents aimaient la musique : mon père jouait de la guitare, et ma mère chantait pour le plaisir. C’est en regardant un film avec Harry James que j’ai eu envie d’apprendre la trompette, j’ai débuté dans un orchestre. Sont survenus les événements du canal de Suez, nous sommes revenus en Grèce et à l’époque j’ai découvert le Jazz, je me suis mis à la basse, à la contre basse, et j’ai rejoint un groupe de Soul. J’étais inspiré par Otis Reding, Nina Simone, tous les artistes de la Motown de l’époque.

Comment êtes vous devenu chanteur ?
En fait, j’étais second chanteur dans les groupes comme les Idols, les We Five, ou encore les Minies, je soutenais la voix du soliste. Puis, un soir, j’ai du le remplacer et c’est dans les mêmes moments que j’ai rencontré Vangelis en Grèce, nous sommes montés à Paris et le succès est arrivé très vite avec les Aphrodite Childs, je suis passé du Jazz à la pop!

Les Aphrodite Childs ont duré 2 ans. Pourquoi cet arrêt en plein succès ?
Avec Vangelis, on savait que chacun voulait faire son truc, ma voix c’était un peu son véhicule qui l’a emmené en dehors de Grèce.

Vous basculez alors de la pop psychédélique à la variété...
Oui, et cette période a duré environ 6 ans. Puis j’ai arrêté d’enregistrer parce que je n’avais plus grand chose à dire. J’ai quand même fait des tournées, j’ai voyagé.

Avec quels artistes aimeriez-vous collaborer ?
Pour l’album Demis, j’ai volontairement choisi des artistes inconnus du grand public, mais pour la suite, je pense à quelques noms, mais je les garde dans ma tête.
Avant la collaboration avec Little Barrie et Picci, vous avez travaillé avec Rachid Taha ... Oui, nous avons fait un album expérimental, mais ça ne rentrait pas dans le cadre de mon nouvel album.

Comment s’est faite la rencontre avec ces jeunes musiciens compositeurs (Little Barrie, Dirty Feel, Picci…) ?
J’ai pensé à eux, j’en ai parlé avec Di Domenico, on s’est rendu compte que c’était une connaissance commune, nos affinités nous ont donné envie de faire un album vintage, avec une essence soul. On est parti enregistrer à Richmond chez Terri Britten, à cause du son exceptionnel de ce studio. La plupart des chansons ont été écrites par Picci.
Il n’y a pas de titre français malgré la présence de Picci. Pourquoi ?
C’est avant tout un album tourné vers l’international, ce n’était pas le but. Je suis très content de cet album qui est de qualité, si ça marche, tant mieux, mais je préfère faire un flop avec quelque chose de bien, plutôt qu’un flop avec quelque chose de mal.

Le 2 février, vous serez au Grand Rex. Allez-vous faire des reprises ?
Bien sûr ! Il y aura tous les succès des Aphrodite Childs et les succès de ma période variété, et bien entendu l’album « Demis ».

Est-ce que votre fils remixera les reprises?
Non, mon fils Cyril est Dj et avait remixé un album de variétés, mais cette fois tous les tubes ont été revus et corrigés par Little Barrie avec cette ambiance rock. Je suis très content du résultat.
Votre voix est devenue plus grave…
J’ai enregistré l’album avec cette voix grave, par choix, chanteur c’est comme être comédien.

Dans les années 90’s vous aviez des envies de Cinéma...
Ah le cinéma ! C’est un rêve de gosse. Je suis devenu musicien par nécessité, pour aider mes parents, maintenant la musique est aujourd’hui un destin. Mais sait-on jamais, le cinéma… si Dieu le veut…

Vous utilisez souvent des mots forts comme miracle, bénédiction quel est votre rapport avec Dieu, l’église?
Avec l’église, pas terrible ! Mais j’entretiens de très bons rapports avec Dieu. J’ai étudié la Tora, le Coran et l’Evangile, le message est souvent le même. Je trouve dommage que la religion soit un business à l’aube d’une époque spirituelle.

Vous avez vécu dans plusieurs capitales et notamment à Paris, qu’aimez-vous ici ?
Paris est magique, avec beaucoup d’énergie, et c’est sans doute la plus belle ville du monde, comment ne pas aimer Paris ? Comment ne pas aimer la France ? Mais, aujourd’hui je vis en Grèce, le pays de mes origines.

Quels quartiers fréquentiez-vous ?
Des quartiers populaire aux plus luxueux, je m’adapte à tout.

Votre prochain single est “Nobody gives a fuck”...
C’est une chanson avant tout politique, car les gens qui nous gouvernent n‘en ont rien à foutre de tout le reste, d’où le Nobody gives a fuck. A la fin de la chanson c’est la voix de Gandhi qu’on entend, il s’agit de son speech avant son assassinat. Je pense que le prochain single sera September.

Parmi votre discographie quel titre, succès vous représente le plus ? Forever and Ever. Parce que pour toujours ! Pour moi un artiste ne devrait jamais faire ses adieux, il meurt sur scène.

Demis Roussos en bref.-
1946: Naissance d’Artémios Venturis
Roussos à Alexandrie.
1961 : Affaire du Canal de Suez,
retour en Grèce de la famille Roussos
1966 : Rencontre avec Vangélis
Papathanassiou
1968 : Chanson « Rain and Tears »
numéro 1 au hit parade, paroles
de Boris Bergman, Musique de Vangélis
1970: “It’s five O’clock”, paroles de Boris
Bergman
1972: Album “666”
1973: “For Ever and Ever”
et “Good bye my love good bye”
1977: « Mourir auprès de mon amour »
1978 : « Loin des yeux loin du Cœur »
1987 : « Quand je t’aime », paroles
de Didier Barbelivien
1989 : « On écrit sur les murs »,
paroles de Jean- Marie Moreau