Tir-Bouchon : indéboulonnable
Novembre. 2007 \\ Par Jérôme Lamy

José est de ceux qui ont fait la rue Tiquetonne. Le Grapillon, Terre et Soleil et Le Tir-Bouchon, dont il s’occupe exclusivement aujourd’hui, c’est lui. Lorsque le quartier devient piéton, il est parmi les premiers à réhabiliter un ancien local en restaurant. Il existait déjà des restaurants bien entendu, mais cette atmosphère festive, cette rue qui voit le chaland hésiter entre deux appétissantes ardoises, c’est un peu José qui en est l’instigateur.
Il n’est pas seul à l’époque à croire en cette petite voie nouvellement pavée. C’est l’époque où David installe aussi le Steps. Les deux acolytes se souviennent de leurs délires de jeunesse, lorsque, déguisés en superman, ils s’aspergeaient au “pistolet à champagne”. Les folles heures insouciantes ont-elles passé? Pas si sûr! Aujourd’hui les ambiances sont peut-être un peu plus raffinées, mais la part de plaisir et de fête est toujours présente.
Les 10 années passées ont tamisé les lumières et sans doute la musique est-elle un peu moins forte, mais José est resté le même. Il n’oublie pas ses origines modestes, sa jeunesse à Bragance dans le Nord du Portugal. “Je suis un vrai fils de portugais : ma mère était femme de ménage et mon père maçon” lâche-t-il fièrement.  C’est sans doute pourquoi il tient autant à l’atmosphère des Halles, à la convivialité. “Je veux que l’on puisse venir se détendre à un prix qui tienne la route”. Pourtant il ne délaisse pas la qualité de sa table, au contraire, il n’a eu de cesse de l’améliorer.
Alors quand son ami de toujours, Philippe Tondetta, décide de vendre son affaire, “Le Petit Pontoise” pour laquelle il a obtenu une fourchette au Michelin, José insiste pour qu’il prenne les commandes de sa cuisine. Il n’est pas peu fier d’avoir enfin son premier vrai chef après 10 ans et ne cache désormais plus ses ambitions gastronomiques. Philippe joue d'ailleurs le jeu avec grand plaisir pour son ami : ”Je travaille chez José de la même façon que je le faisais chez moi”.
José est tellement bien dans son assiette qu’il a bien du mal à fermer ses portes et aller se coucher... il a donc décidé de servir toute la nuit les jeudi, vendredi et samedi soir! Ces dernières semaines il a finalisé la mise en place de l’équipe de nuit. “A présent c’est certain, le Tir-Bouchon a sa place dans la nuit parisienne, enfin au moins dans celle de Montorgueil”, souligne José qui rarement perd le sens de l’humour et de la dérision. “La rue Tiquetonne est géniale. Quand Montorgueil s’éteint, Tiquetonne s’allume.”
Lorsqu’il n’est pas là, il confie les rennes à son filleul, Nicolas qui a fait ses classes, entre autres, à la Closerie des Lilas. Ici seule l’ambiance est décontractée car des cuisines à la salle, point de laisser-aller, tout est très professionnel! José est très perfectionniste. Tous les lieux qu’il a créés sont l’oeuvre de plusieurs mois de travail où chaque détail a été pensé. Il répète souvent que “parler de cuisine, c’est parler d’amour”, et on sent qu’il investit chacun de ses restaurants avec passion, dans un souci autant esthétique que gastronomique.
Mais ne vous y trompez pas, si José s’est recentré uniquement sur le Tir-Bouchon et a revendu ses autres affaires, c’est pour mieux en lancer une nouvelle. “Je ne suis pas David Guetta ou Jean Roch, mais je veux aussi laisser un petit héritage dans la nuit parisienne avec mes petits moyens” lance José, spécialiste de dessin industriel et donc de la conception de nouveaux lieux. Un futur projet ambitieux ne tardera donc pas à faire bouger encore davantage le quartier. En effet, José ouvre, à la fin du printemps prochain, rue Saint-Denis, sur 3 niveaux, un pour l’enfer, un pour le purgatoire et enfin un dernier pour le paradis, un club-restaurant qu’il a déjà baptisé J’OZ !

 

Le Tir-Bouchon - 22, rue Tiquetonne -
Paris 2e