La plus belle poule.
Septembre. 2007 \\ Par Jérôme Lamy

Entre belle poule, on se comprend. L’ancien mannquain Karen Mulder appelle affectueusement La Poule au Pot: «Ma plus belle poule.» La Poule au Pot est surtout une institution d’avant guerre (1935) qui n’a pas pris une ride, un dernier vrai bistrot parisien où l’on retrouve l’atmosphère des anciennes Halles. Normal, Paul Racat, le propriétaire des lieux, accueille tous les soirs, ses clients avec chaleur et bonhommie communicative.
A peine entré dans ce lieu mythique des nuits parisiennes, on comprend mieux pourquoi l’esprit noctambule bon enfant des Halles ne s’est pas éteint et pourquoi les stars internationales  - immortalisées par des plaques en cuivre  au dessus des banquettes - ont fait du 9 de la rue Vauvilliers, derrière le Jardin des Halles, leur cantine. Si les Rolling Stones, Naomie Campbell, Alice Cooper, Prince, Bruce Springsteen, Marianne Faithfull ont fréquenté les lieux, c’est Patrick Juvet, qui a fait décoller l’adresse en découvrant le bon plan et en conviant très vite ses amis du show bizz.
Tous ont signé l’étonnant livre d’or de la maison. Mieux, depuis le sympathique et facétieux Paul Racat les convie à un dessin pour finir la soirée. «C’est un héritage de mes années passées aux Beaux Arts» sourit le patron, originaire de Moulin dans l’Allier. «J’ai très vite compris que Dali ou Picasso était unique et je me suis lancé dans la restauration.»
Le jeune cuisinier commence par du lourd. Il fait ses armes chez Prunier, à la Tour d’Argent et au Plazza Athénée. C’est sans doute pourquoi aujourd’hui les grand palaces parisiens, à l’instar du Ritz, lui envoie leur prestigieux clients. «C’est assez drôle de savoir que ces clients payent une chambre des milliers d’euros et dînent pour un ticket moyen tout à fait raisonnable» confie Monsieur Paul.
Reste que l’embellie et la notoriété des lieux ne doit pas faire oublier les débuts difficiles de l’histoire. Quand  Paul Racat débarque en 1973, les halles, chamboulées par le départ à Rungis, sont un vaste de ruine, un trou au sens propre et figuré, où de nombreuses affaires sont à vendre.
Il fallait osé misé un sou sur le quartier. Dans un premier temps, les clients enjambent les marteaux piqueurs et les gravats pour entrer au restaurant. Aujourd’hui, c’est tapis rouge. «On aurait du laisser un Pavillon de Baltard dans le Jardin des Halles pour crééer un marché permanent» regrette Paul Racat, qui a racheté l’affaire à Madame Peniguier, décédée six mois avant ses 100 ans alors que Paul avait prévu une fête magitrale. «C’était une femme en or, qui m’avait fait promettre de ne pas dénaturer les lieux ou vendre avant sa mort.»
C’est toujours pas d’actualité même si les nouveauxw travaux de rénovations des Halles font forcément peur. «La première fois, on nous avait promis cinq ans de travaux, ils ont duré treize ans...» lâche Paul Racat décoré du Mérite Agricole (1999) et du Mérite National (2002).
Dire que la poule au pot d’Henri IV trône encore et toujours sur les Halles est un doux euphémisme, surtout quand elle s’accompagne d’épinards crus et de foies de volaille au volaille, dans une belle soupière. Pour ceux qui bouderaient le bon roi, on ne saurait trop conseiller la poularde aux morilles, la cassolette de tripes à la mode de Caen et surtout l’œuf cocoette au foie gras.
Et comme l’équipe de serveur efficaces, surfant de table en table dans la plus ancienne tradition bistrotière, n’oublie jamais sourire et sa bonne humeur au vestiaire, La Poule au Pot est un indétrônable.

 

La Poule au Pot
9, rue de Vauvilliers
75001 Paris
01 42 36 32 96