Jihane Bougrine: Les leçons de vie de Salwa Tazi
Mars. 2016 \\ Par Jérôme Lamy

présentatrice des Escales Littéraires du Sofitel Jardin des Roses, à Rabat, Jihane Bougrine explique le succès de Journal d’une mère en deuil, le dernier roman de Salwa Tazi qu'elle a eu le bonheur de recevoir.

Clin d’œil.- Comment classez-vous Salwa Tazi dans le paysage de la littérature marocaine ?

Jihane Bougrine.-  Elle est difficile à classer et c’est ce qui fait sa force. Elle ressemble à la littérature marocaine en général qui puise dans le réalisme, dans le vécu, on trouve souvent des autobiographies, des biographies, des romans réalistes. Elle est dans ce registre, de par ce qu’elle a vécu et ce qu’elle raconte, certes. Mais elle est surtout à mi-chemin entre la plume romantique et philosophique, elle possède des vertus presque thérapeutiques. A travers un roman biographique, elle raconte les faits mais ne fait pas qu’étaler son histoire. Loin s’en faut ! Elle apaise sa peine et celle de ses lecteurs à l’aide de ses « maux » sur fond de leçon d’humanité, leçon de vie. C’est presque surréaliste même. Cette façon qu’elle a d’être dans la douleur mais de ne presque pas l’utiliser, de ne pas s ‘étaler sur cette injustice de la vie et revendiquer, en vouloir à la terre entière. Au contraire, elle conforte, dans ses hauts et ses bas, dans cette descente aux enfers, elle pense à l’autre...

 

Son roman, Journal d’une mère en deuil, a remporté le prix du premier ouvrage lors de la 3e édition du prix littéraire Sofitel Tour Blanche...

C’est un roman sincère et plein d’humanité. Il touche les cœurs et apaise, ce n’est pas étonnant qu’il ait eu autant de succès. Honnêtement, j’étais sceptique en découvrant le titre du roman. Mais en lisant les premières pages, je comprenais qu’il n’y avait pas lieu de s’inquiéter. L’écriture est simple et belle. Les mots sont très bien choisis. C’est linéaire mais ponctué par des citations, illustré par des proverbes. Je pense que le succès vient du fait que chacun de nous s’y retrouve quelque part. Elle parle à l’humain, au cœur directement. Elle touche. Quand un roman procure de l’émotion, c’est gagné.

Quel est le message délivré par ce roman, Journal d’une mère en deuil ?

Le message principal est que nous sommes tous égaux face à la perte d’un être cher, face à la douleur. Il n’y a plus de classes sociales, de religions, de cultures qui séparent. Nos cœurs sont les mêmes. C’est ce que Le Journal d’une mère en deuil m’inspire en tout cas. Le récit de cet horrible accident qui a chamboulé toute une famille, les conséquences et comment surmonter cette peine est expliqué, pointé du doigt, analysé et décortiqué presque avec des versets du Coran, des extraits de la Bible, des textes bouddhistes ou encore des proverbes ou des citations de grands auteurs. Pour moi, ce roman délivre un message de paix… intérieure.

 

Quels écrivains rêvez-vous de recevoir, à Rabat, lors du rendez-vous mensuel des escales littéraires du Sofitel Jardin des Roses?

Il y en a tellement ! Le premier sur ma liste, c’est David Foenkinos ! C’est une des meilleures plumes de sa génération ! Ses romans sont meilleurs à chaque fois, ses histoires simples et drôles. Je l’ai déjà rencontré il y a quelques années lors de son passage à Casablanca, quelle tête bien faite ! Une escale littéraire avec lui serait des plus enrichissantes ! D’autant plus qu’il a fait une belle rentrée avec son roman « Charlotte » ! Sur ma liste, il y a également Delphine De Vigan, Marie Ndiaye, Tahar Benjelloun, Driss Chraibi…mais elle est tellement longue. Il me faudrait 24 mois dans une année pour accueillir tous ces trésors  !